Cruella, de Craig Gillespie, le 23 juin en salles
On craignait que ce prequel aux 101 Dalmatiens ne soit complètement raté, c’est l’un des films les plus réjouissants de cette réouverture des salles obscures ! Le réalisateur Craig Gillepsie propose au spectateur de découvrir la jeunesse du personnage malveillant du roman de Dodie Smith publié pour la première fois en 1956. Mais avant de kidnapper les 101 dalmatiens, Cruella était Estella, une jeune orpheline qui rêvait de devenir créatrice de mode. Cette énième variation autour de Cruella – rappelons-nous de Glenn Close qui l’incarnait déjà en 1996 et 2000 – ravira tous-toutes les amoureux-ses de couture. Les tenues excentriques, glamour ou punk revêtues et créées par Estella-Cruella valent le spectacle à elles seules !
L’action se déroule dans un Londres complètement fantasmé et fantasque, un lieu et une époque improbables qui combinent et condensent la tradition nobiliaire British la plus caricaturale avec l’énergie des premières années punk. Estella, privée de maman à la suite d’un horrible meurtre dont elle a été le témoin (et le déclencheur), grandit auprès de deux autres orphelins, Horace and Jasper, qui dans l’adaptation animée de 1961 sont les hommes de main un peu balourds et idiots de Cruella de Vil. Comme toute bonne prequel qui se respecte, on introduit et surtout on explique de nombreux éléments de l’intrigue à peine esquissés dans le film d’origine. Craig Gillespie et les scénaristes Tony McNamara / Dana Fox ont eu la bonne idée de développer ces deux personnages secondaires, notamment Jasper, élégamment interprété par le nonchalant Joel Fry qu’on avait déjà adoré dans le film Yesterday ou dans la série You, me & the Apocalypse.
Estella ne devient pas Cruella par hasard. D’abord, il y a forcément le meurtre de sa mère, le traumatisme qui en résulte et la soif de vengeance qui ne cessera de grandir au fur et à mesure qu’elle apprendra la vérité sur ses origines familiales. Impossible de trop en dire au risque de gâcher le suspense d’un film qui ne manque pas de rebondissements même si le dernier sera prévisible pour beaucoup de spectateurs. Malgré les outrances de Cruella – qui vont crescendo tout au long du film – cette méchante devient presque sympathique, tout au moins humaine, car nous sommes amenés à compatir avec son drame personnel.
Si le film manque parfois de subtilité dans sa manière de décrire le basculement d’Estella vers le mal – on a parfois l’impression d’être face aux personnages schizophréniques des univers Marvel ou DC Comics, le Joker en tête – les quelques réserves que l’on pourrait avoir quant à l’écriture du scenario ou la réalisation sont balayées par le somptueux face à face entre les deux méchantes : l’apprentie badass Estella/ Cruella et la maîtresse de cérémonie et surtout maîtresse du jeu, la baronne sadique interprétée par Emma Thompson. Par moments, l’émulation malsaine entre les deux rappelle le duo du film Le Diable s’habille en Prada, même type de relation professionnelle déviante, même milieu de fashionistas.
Variation autour de la figure du double, le film fait exprès de ne pas répondre à cette question pourtant cruciale : naît-on méchant – est-ce génétique – ou le devient-on ? Visuellement éblouissant, Cruella comporte des scènes à l’esthétique très réussies, comme celles de la robe enfermée dans le coffre-fort ou celle de la robe qui prend feu.
Le film aurait gagné à être un peu moins long mais son rythme, sa beauté plastique et l’excellent jeu des deux actrices principales font de lui un divertissement familial tout à fait recommandable.
23 juin 2021 au cinéma / 2h14min / Comédie, Drame, Famille
De Craig Gillespie
Par Tony McNamara, Dana Fox
Avec Emma Stone, Emma Thompson, Paul Walter Hauser
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