Gaza mon amour, Arab et Tarzan Nasser, le 4 octobre au cinéma
Transformer Gaza en haut-lieu romantique ? C’est le pari des frères Arab et Tarzan Nasser qui signent une délicieuse comédie, déjà projetée à la Mostra de Venise, au Toronto International Film Festival, au Arcs Film Festival et qui sort en salles le 6 octobre. Le film a représenté la Palestine dans la catégorie meilleur film en langue étrangère à la 93e cérémonie des Oscars, le 25 avril 2021 à Los Angeles.
Avec Gaza mon amour, comédie romantique poivre-sel, les talentueux réalisateurs palestiniens prennent le contre-pied des images traditionnellement associées à cette région du monde sinistrée. Certes, le quotidien des habitants de la bande de Gaza, déjà rythmé par les lâchers de bombes de l’armée israélienne, est rendu encore plus pesant par les contrôles incessants du Hamas et des policiers corrompus. Mais, les héros vieillissants de cette histoire d’amour qui résiste aux modes sont d’incorrigibles rêveurs, entraînés malgré eux dans une succession d’événements absurdes qui rappellent les univers de Charlie Chaplin ou de Buster Keaton.
L’acteur Salim Daw se révèle très convaincant dans le rôle d’Issa, un pêcheur bougon de soixante ans, transi d’amour pour Siham, vendeuse de marché interprétée par Hiam Abbass, toute en retenue et dignité statuesque. Ces deux-là ne vont cesser de se croiser, de se rater, de se retrouver dans un récit habile qui mêle deux fils conducteurs : l’obsession grandissante du vieux garçon pour sa belle et la découverte d’une statue antique représentant le Dieu Apollon. L’incroyable trouvaille du pêcheur est bien entendu métaphorique. Alors que le courage lui manque pour aborder Siham sans de nouveaux prétextes (des pantalons à raccommoder, un parapluie prêté à récupérer), cette divinité littéralement prise à ses filets de pêche semble lui insuffler des forces inespérées. Sauf que les réalisateurs, qui sont frères, préfèrent à la gémellité, les images de miroir inversé. Apollon, trop lourd pour le vieux pêcheur, fait donc une chute tragique et le voilà privé de son fier attribut viril.
Issa n’est pas le seul à être troublé par cette statue émasculée. La police ne sait que faire de l’encombrant Apollon et les autorités aimeraient bien en tirer un petit avantage financier avant de la refiler à un musée. Malgré les multiples séparations dues à l’acharnement des autorités contre Issa, l’amour réussit à se frayer un chemin. Si les réalisateurs alternent les plans en plongée et contre-plongée pour filmer Issa qui ne semble être maître de la situation qu’à bord de son bateau, le bonhomme ne manque pas de ressources. Les frères Nasser qui ont tourné ce film en Jordanie et au Portugal ont voulu montrer qu’il suffit d’un peu d’imagination pour réenchanter le monde. Chaque rencontre fortuite ou orchestrée par l’amoureux se déroule au son de l’air de valse interprété par Musetta dans la Bohème de Puccini. Issa n’a peut-être pas beaucoup d’argent mais c’est un être animé d’un profond bonheur. En dépit de la situation politique tragique, il lui suffit de quelques sardines, d’une cassette de Julio Iglesias pour s’évader et surtout…concrétiser ses rêves. Le couple de Gaza mon amour est peut-être filmé en clair-obscur, coupures d’électricité oblige, mais il ne manque pas de lumière pour briller de mille feux et nous inciter à virevolter avec plus de légèreté.
14 avril 2021 / 1h 28min / Comédie, Drame
De Arab Nasser, Tarzan Nasser
Avec Hiam Abbass, Salim Daw, Maisa Abd Elhadi
Nationalités français, allemand, portugais, qatarien, palestinien
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