Black is Beltza, Fermin Munguruza, 8 mai
Course-poursuite haletante à travers le monde, du Québec à Alger, en passant par La Havane, New York, Madrid et Biarritz, Black is Bletza est une petite merveille de récit historique. Soit les déambulations d’un activiste basque qui, par de curieux hasards et un sens consommé de la provocation, se retrouve au carrefour de différents militantismes, formant un vaste puzzle politique où espions, révolutionnaires, membres d’agences de renseignement et artistes engagés s’affrontent, s’allient, se trahissent, et s’aiment, pour maintenir un certain ordre mondial, ou au contraire, le dynamiter.
L’histoire commence lors de la grande parade de New York de 1965. Manex ne comprend pas pourquoi les traditionnels géants basques de Pampelune sont autorisés à défiler tandis que les géants noirs doivent rester dans leur hangar. Avide de nouvelles aventures et révolté par la ségrégation raciale, Manex troque de cause. Le retour au pays basque attendra : il s’enfonce un peu plus dans Harlem et fait la connaissance d’une belle cubaine qui l’entraînera aux côtés du Che et Fidel. Avec sa double nationalité (espagnole et française), celui qui aimerait qu’on le considère citoyen basque devient un espion qui officie comme reporter d’images pour ne pas être repéré par la CIA. Si l’intrigue de base est surtout prétexte à un voyage à travers les mouvementées années 1960, le réalisateur tisse un solide écheveau historique ponctué de rencontres avec les grandes figures de la contre-culture de l’époque : Angela Davis et les Black Panthers, Warhol et les artistes de la Factory, Juan Rulfo et les peintres muralistes mexicains…
Le film est ponctué d’images et d’enregistrements d’archives, très bien intégrées à l’animation. Elles reviennent, par exemple, sur les émeutes suite à la mort de Malcom X, le discours de De Gaulle sur le Québec Libre, ou l’interdiction de ring pour Cassius Clay qui est devenu objecteur de conscience. Le film de Fermin Muguruza, est un défilé d’artistes de l’époque : l’écrivain Juan Rulfo, l’acteur mexicain Tin Tan (Germán Valdés) qui prêtait sa voix à des personnages Disney (Baloo dans Le Livre de la Jungle) et bien sûr Otis Redding dont la trompette est le fil d’Ariane du héros principal. Black is Beltza ne se limite pas à une galerie de portraits.
Le rythme, soutenu jusqu’au bout, fait la part belle aux rebondissements. La bande-son qui réunit des chanteurs-teuses aussi divers que Manu Chao, Anari, Iseo, Amel Zen, The Sey Sisters, Ceci Bastida (Tijuana No!), ou des tubes 60’s comme «You’re wondering now», la version jamaïcaine originale, par Andy&Joey, accompagne parfaitement les décors et arrière-plans reconstitués avec soin par Iñaki Holgado (de la BD Verdun).
Tous les amateurs d’histoire (et de cette période en particulier) adoreront se retrouver transportés au festival de Monterrey ou à l’exposition universelle de Montréal, en 1967. Les intérieurs, d’un bar à Tijuana, en passant par une salle de cinéma à Alger ou les chambres et espaces de réception du Magic Castle à LA, sont incroyablement riches de détails réalistes. Black is Beltza est une fascinante plongée dans le temps, matinée d’un polar politique, à réserver à un public adulte pour ses scènes d’amour assez crues.
Date de sortie : 8 mai 2019 (1h 28min)
De Fermin Muguruza
Avec Unax Ugalde, Isaach de Bankolé, Iseo…
Genres : Animation, Aventure
Nationalité : espagnol
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