Cary Grant, de l’autre côté du miroir (Becoming Cary Grant), Mark Kidel, Cannes classics 2017, avant-première 4 octobre

Projeté en avant-première le 4 octobre au Forum des Images (Paris) à 19h, en présence de son réalisateur, Cary Grant, de l’autre côté du miroir, est un documentaire passionnant malgré quelques choix de mise en récit maladroits. Le film de Mark Kidel a été présenté lors de la sélection Cannes Classics en mai dernier. Logique puisque la figure mythique de Cary Grant, qui comptabilise plus de 70 films à son actif, traverse les âges d’or du cinéma, aussi à l’aise dans les années 1930 avec de nombreuses screwball comedies, donnant la réplique à une Katharine Hepburn au sommet de son art, que dans les décennies suivantes, au générique de comédies de remariage, de films romantiques ou de suspenses hitchcockiens.

Cary Grant et Katharine Hepburn dans l’Impossible Monsieur Bébé

Cary Grant a tenu tête aux plus belles femmes d’Hollywood : Grace Kelly (autre star fétiche d’Alfred Hitchock), mais aussi la jeune Audrey Hepburn dans Charade de Stanley Donen alors qu’il était un acteur vieillissant. De talentueux réalisateurs ont exploité son potentiel comique, George Cukor dans Indiscrétions ou Frank Capra dans Arsenic et vieilles dentelles, avant de s’apercevoir que l’acteur excellait aussi dans des registres plus sombres et dramatiques. Le documentaire de Mark Kidel, s’il s’intéresse à l’intimité de l’acteur, prend le temps de retracer avec panache la fabuleuse carrière de Grant.

Le titre français est trompeur : le réalisateur ne propose pas une plongée en eaux troubles en menant l’enquête sur les faces cachées du géant (sa bisexualité présumée, son désir de contrôle permanent sur ses 4 premières épouses…). Après tout, difficile d’éclairer ces questions quand les principaux intéressés – à l’exception de sa 5e femme Barbara Jaynes et de sa fille Jennifer ici interviewées- sont tous décédés. Pour autant, Mark Kidel ne peut faire l’impasse sur l’enfance traumatique de l’acteur, né Archibald Alexander Leach à Bristol, en Angleterre. A 9 ans, sa mère disparaît un matin. Son père prétendra d’abord qu’elle est partie en voyage puis qu’elle est morte. En réalité, il l’a fait interner en hôpital psychiatrique et Archie, devenu Cary Grant, ne l’apprendra que bien des années après.

Archie Leach, à Bristol, avant de devenir Cary Grant

Le documentaire de Kidel insiste -peut-être un peu trop- sur le conflit œdipien jamais résolu mais à travers un savant mélange d’archives inédites et d’extraits de films (des plus connus aux moins connus comme Penny Serenade et None but the Lonely Heart), il montre que la persona filmique de l’acteur accompagnait un processus de réinvention de soi. Archie Leach est devenu Cary Grant pour tourner le dos à son passé, effacer les secrets honteux entourant son adolescence de saltimbanque. Confié de proches en proches, il est méprisé par son père qui a refondé une famille, à peine quelques semaines après la mystérieuse disparition maternelle. C’est sur scène, auprès des acrobates et des clowns de la troupe Bob Pender, qu’il renaît une première fois.

Le futur Cary Grant, en bas à droite avec la troupe Bob Pender

Becoming Cary Grant ouvre une brèche dans l’inconscient de la star, si réservée hors plateaux. Et peu importe si Cary Grant prenait du LSD lors de sessions psychanalytiques dans les années 1960. A cette époque, il n’était pas le seul  consommer de la drogue à des fins thérapeutiques lors des consultations orchestrées par le psychiatre Mortimer Hartman. Les séquences qui mettent en scène son traitement pèchent par leur dimension télévisuelle : le réalisateur a cédé à la mode actuelle qui vise, au sein du documentaire, à reconstituer un passé avec des éléments de décoration fictive au lieu d’illustrer des faits par des images d’archives. Kidel pouvait s’en tenir aux archives : les extraits de films montrent à quel point Cary Grant, acteur multi-facettes aux manières policées, est insaisissable.

Hitchcock et Cary Grant, deux britanniques à Hollywood, deux comiques qui portaient un regard à la fois sombre et amusé sur l’humanité. Ici, dans La main au collet.

La grandeur de Cary Grant est d’être un héro de cinéma en soi sans jamais rien laisser transparaître de sa personnalité profonde. Le film rassemble des extraits de films personnels inédits tournés par l’acteur. Ces images de famille, ces souvenirs de voyages, notamment en Angleterre, témoignent de sa quête personnelle. Jonathan Pryce lit des passages du journal intime jamais publié de l’acteur. Derrière le regard facétieux de Cary Grant, star adulée et courtisée, le souvenir d’un enfant triste, qui devenu père à son tour, abandonna la scène et ses multiples déguisements, pour se consacrer à plein temps à sa fille.

Date de sortie : prochainement (1h 25min) / avant-première le 4 octobre à 19h au Forum des Images
De Mark Kidel
Avec Judy Balaban, Mark Glancy, Barbara Jaynes…
Genre : Documentaire
Nationalité : français

Partenariat Showtime Documentary Films et Arte France.

Produit par Yuzu Productions, coproduit par Arte France, en association avec ro*co films productions.

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