Sélection estivale Bouquins cinéma : Hollywood ne répond plus, Double Vague, Doctor Who le guide ultime…
Vous ne savez quoi emporter sur la plage pour vos lectures entre deux trempettes ? Cinéscribe vous conseille quatre bouquins cinéma, de quoi répondre à tous les goûts cinéphiles !
- Hollywood ne répond plus
On s’envole pour Hollywood qui ne répond plus au bout du fil avec l’excellent ouvrage d’investigation–fiction (car écrit de manière très romanesque) d’Olivier Rajchman. Le journaliste de Studio Ciné Live, directeur des rubriques Documentaires et Sagas à Télé Star, entremêle les destins agités de Marilyn Monroe, Joseph L. Mankiewicz, Darryl F. Zanuck et Elizabeth Taylor…
On croise aussi dans ce récit flamboyant les membres du Rat Pack et le clan Kennedy (forcément), Richard Burton (évidemment) et pléthore de figures historiques devenues mythiques par le rôle clef joué dans l’ascension (Taylor) ou la chute (Monroe) des déesses de l’écran. Sur fond de bras de fer entre les actrices et leurs studios respectifs et de luttes fratricides au sein des majors, Hollywood ne répond plus s’intéresse à une période clef de l’industrie cinématographique nord-américaine, une décennie marquée par plusieurs débâcles, le tournage inachevé de Something’s got to give (au titre oh combien prémonitoire) et les monstrueux Cléopâtre et Le jour le plus long.
A l’origine de ce livre fleuve, une rencontre, alors qu’il était tout jeune rédacteur en 1992 : Olivier Rajchman sympathise avec Joseph L. Mankiewicz qu’il est venu interviewer lors du Festival de Cinéma Américain de Deauville. Le réalisateur, au crépuscule de sa vie, souvent méfiant des journalistes, se confie volontiers à ce passionné. Il faudra attendre 2013, avec une projection en session Cannes Classics, pour que la version restaurée et complète de Cléopâtre soit accessible au spectateur, exauçant ainsi le vœu le plus cher du cinéaste.
Si la reconstitution minutieuse de l’ambiance de cette décennie charnière ravira le lecteur qui appréciera les nombreuses photographies, les extraits d’articles de presse et les inédits du journal intime de Mankiewicz, l’ouvrage d’Olivier Rajchman réussit à ne pas s’enferrer dans la seule veine historique.
En rendant hommage à une vision, celle de Mankiewicz, en lutte contre les contraintes économiques imposées par les studios, le journaliste saisit la part subjective qu’il y a derrière tout acte de cinéma : un véritable ouvrage cinéphile!
Broché: 352 pages
Editeur : BAKER STREET ÉDITIONS (18 mai 2017)
Langue : Français
ISBN-10: 2917559470
ISBN-13: 978-2917559475
- Double vague de Claire Diao.
Attention, coup pied dans la mare ! L’ouvrage de Claire Diao, journaliste ciné pour Canal + Cinémas et membre de la commission « Aide à l’écriture » du CNC, met en lumière de jeunes réalisateurs issus de l’immigration (toutes générations confondues) ou originaires des banlieues.
On a beaucoup parlé de Houda Benyamina (Caméra d’or 2016 avec Divines), un peu moins d’Alice Diop (auteure du magnifique court-métrage Vers la tendresse à propos de jeunes hommes de quartiers sensibles qui s’expriment sur l’amour, césarisé en 2017). Qu’ils s’illustrent dans le domaine de la comédie (La Vache de Mohamed Hamidi), avec des moyens de production dérisoires (Donoma, le film à 150 euros de Djinn Carrenard) ou qu’ils soient plusieurs membres d’une même famille à devenir réalisateurs (les frères Ayouch), les cinéastes interviewés par l’auteure sont suffisamment nombreux et talentueux pour incarner un nouveau courant du cinéma français.
Mais quel courant ? être issu de l’immigration suffit-il à caractériser leurs films, leurs ambitions ? S’il est question d’origines métissées, de racisme ordinaire et de désir de revanche sociale dans les confidences recueillies par Claire Diao, l’enquêtrice ne se contenter pas d’étudier l’émergence de cette double vague à travers le prisme communautaire qui enferrait de nouveau ces cinéastes dans des stéréotypes raciaux. L’auteure qui écrit dans son introduction coup de poing « quand donc la France les a-t-elle aimés ? Lorsqu’elle leur a proposé d’être animateurs de centres aérés ? » livre une analyse socio-historique percutante et pertinente.
En scrutant de près les réseaux, les festivals (Regards jeunes sur la cité, Cinébanlieue, Alakis’Land…), les initiatives locales et associatives qui ont permis à tous ces réalisateurs de s’exprimer, Claire Diao dresse une cartographie minutieuse d’une industrie presque parallèle composée de mordus de cinéma et d’adeptes de la débrouille refusant en bloc les étiquettes qui collent encore à la peau de la troisième génération Black Blanc Beur.
On pourrait croire que depuis les marches SOS racisme des années 1980, tout jeune -quelles que soit ses origines ou sa couleur de peau- pouvait aspirer aux mêmes études cinématographiques et à la même insertion dans le métier que son homologue des beaux quartiers parisiens. En 1989, Isaach de Bankolé révélait à Ciné-Bulles : « Il m’arrive souvent de recevoir des scenarios où tous les personnages ont des noms sauf le nègre. Quand ce personnage parle, on inscrit le Noir. Il n’est pas un être humain, il n’est qu’un stéréotype. » Claire Diao montre que si certains termes tels que nègre ou « le Noir » ont été bannis des scénarios, l’acteur issu de la minorité reste tout de même cantonné à des rôles de subalterne, ou pire de déviant. Et d’égrainer cette liste en guise d’illustration : Rachida Brakni est une prostituée dans Chaos (2001), Tahar Rahim un détenu dans Un prophète (2008), Omar Sy un chômeur dans Intouchables…
Claire Diao démonte, à l’aide de nombreux exemples (pourquoi le deuxième film de Djinn Carrenard passé de 150 euros de budget à 1,48 millions s’est fait descendre) et de faits étayés, cette entreprise de sape, souvent inconsciente, chez les dénicheurs de talents et les producteurs de films. C’est un peu, en plus subtil, le concept de films wesh wesh décrit par Pierre Bas dans son Panorama Impertinent du Cinéma Français. Ou comment dicte-t-on à des milliers de jeunes de rester à leur place, de réaliser des films estampillés banlieue, et de ne pas s’aventurer hors des sentiers battus.
L’intérêt du livre de Claire Diao est aussi de mettre en lumière des collectifs (les médias insistent souvent sur une ou deux personnalités tels que Jamel Debouzze ou Omar Sy) et des itinéraires singuliers qui montrent que ces jeunes réalisateurs quittent la France pour acquérir des compétences et développer leur imaginaire. Ainsi, elle cite l’expérience d’Holy Fatma qui s’est envolée, au petit bonheur la chance, pour Hollywood. Elle raconte : « J’ai envoyé mon CV à trois cent boîtes que je ne connaissais pas. ‘Voilà je parle 5 langues, j’ai un master de cinéma, je cherche un job.’ J’ai eu trois réponses dont celle d’une boîte de pub qui m’a prise. Elle m’a très bien payée pour mon premier job alors qu’en France, je savais que j’aurais été cantonnée à des stages pendant 5 ans, à lécher le cul de l’un, à ramener des cafés à l’autre et à ne pas fondamentalement arriver à faire tout ce que je voulais faire. »
Au delà de la trajectoire personnelle d’Holy Fatma , l’analyse de Claire Diao dessine les contours d’une fracture générationnelle qui ne se limite pas au seul monde de l’industrie cinématographique mais parcourt l’ensemble des familles de métiers.
Ce livre ne fera pas que des heureux car presque tout le monde en prend pour son grade, les universitaires (Eric Fassin), les critiques de cinéma dont Isabelle Régnier du Monde qui, à propos de Bandes de Filles, amalgamait les ouvrières maghrébines à des esclaves (« les mères de famille qui acceptent d’être techniciennes de surface ne sont pas des esclaves. Ce sont des femmes dignes qui paient leurs impôts et rapportent de l’argent à leur foyer »), les institutions trop frileuses en termes de financement…
Le livre traite donc avec acuité du problème de la représentation, dans les médias et les instances de direction, des populations nées en France mais à qui l’on rappelle toujours leurs origines. Il invite aussi à réfléchir sur les visions biaisées que peuvent véhiculer la presse et le cinéma sur ces territoires fantasmés que sont devenues les banlieues. Enfin, il propose des pistes pour favoriser l’écoute de réalisateurs talentueux qui aiment la banlieue mais ne souhaitent pas forcément s’y cantonner pour tourner leurs films. A l’heure où l’on affirme qu’une femme ne peut plus se promener en jupe dans le quartier La Chapelle et que l’acteur qui joue l’ouvrier dans la pub Carglass est invariablement noir ou beur, ça donne à réfléchir !
340 pages
Editeur : Au Diable Vauvert (18 mai 2017)
Collection : DOC
Langue : Français
ISBN-13: 979-1030701289
Dimensions du produit: 20 x 2,9 x 13 cm
- Doctor Who, le guide ultime !
Pas besoin d’être geek pour apprécier Doctor Who, véritable institution au Royaume-Uni. Le guide publiée par les éditions 404 (petit clin d’œil à l’erreur 404) est une traduction (réussie de Nicolas Ivorra) du guide original publié de l’autre côté de la Manche.
Concept simple mais efficace, chaque chapitre est consacré à un docteur. On retrouve un guide des épisodes, saison après saison, et des pages pour les différents compagnons (Clara, River Song, Amy Pond…) et ennemis du célèbre seigneur du temps. La galerie de portraits de monstres permet de saisir toute l’inventivité des scénaristes et des responsables effets spéciaux au fil des décennies. Des Siluriens aux Rutans en passant par les Vervoids et les Krillitanes, sans oublier les Daleks, Cybermen et Anges Pleureurs, c’est toute une faune étrange auscultée sous nos yeux de lecteurs.
Richement illustré, ce guide donne toutes les clefs pour comprendre cette saga culte qui existe depuis les années 1960. Les anecdotes nous révèlent aussi plein de choses sur les différents acteurs (à quand une femme dans la peau du survivant de Gallifrey ?) qui l’ont incarné au petit écran.
404 éditions
Sortie : 20/04/2017 | 232 pages
ISBN : 9791032401149 / 16,95 euros
- Jardins de cinéma de Michel et Marie Berjon (préface de Pierre Murat)
C’est un livre touffu où il fait bon s’y promener, comme dans les allées boisées d’un parc anglais. Plusieurs promontoires offrent une vue privilégiée sur de denses thématiques telles que Le jardin salutaire ou La Convivialité dans le jardin.
L’ouvrage érudit de Michel Berjon, assisté de sa fille Marie, ne se lit pas d’une traite mais invite à la réflexion et à la méditation. Surtout, par sa dimension visuelle très documentée, même s’il l’on regrette qu’il ne soit pas davantage illustré, il invite à replonger dans ses souvenirs personnels, de films et de jardins, et de jardins entraperçus ou longuement filmés au cinéma.
L’auteur a été chargé d’enseignements auprès d’étudiants paysagistes et son matériel filmographique, très didactisé, se veut exhaustif. A partir d’une approche transdisciplinaire peu développée par les historiens ou les critiques de cinéma, Michel Berjon propose une analyse fine et originale de films dont le récit et les personnages sont indissociables du jardin, par exemple Les Jardins du Roi ou Magic in the Moonlight, mais traite aussi d’œuvres moins connues (Echo Park, L.A. ou Tokyo Park). Un livre passionnant appelé à devenir une référence dans le domaine.
Broché: 480 pages
Editeur : Editions Petit Génie (8 novembre 2016)
Langue : Français
ISBN-13: 979-1093104133
ASIN: B01LC4VTMU
Dimensions du produit: 20,5 x 4 x 16 cm
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