Moi, Daniel Blake, Ken Loach, en DVD le 1ier mars

Palme d’or amplement méritée pour ce mélodrame engagé qui vise juste sans jamais sombrer dans le misérabilisme, Moi, Daniel Blake sort en DVD le 1ier mars. Le dernier film de Ken Loach n’est pas juste le reflet d’une époque ou d’un lieu, à savoir l’Angleterre contemporaine qui a condamné les ouvriers des Midlands et d’ailleurs, à une suite de tracas administratifs et financiers les menant droit à la ruine et à la mort. Non, le dernier film du réalisateur britannique préfigure une situation qui guette la classe moyenne européenne, celle-là même qui est brocardée dans son film pour sa docilité à servir et à défendre un système bureaucratique inique car fondé sur les aberrations sociales engendrées par l’application du libéralisme économique à la santé, le logement, l’éducation ou le travail.

La suite des problèmes auxquels se confronte le héros éponyme du film, Daniel Blake, un menuisier victime d’une crise cardiaque à l’orée de la retraite, fait froid dans le dos tant elle symbolise un fonctionnement de la société à la Brazil, film tourné en 1985 par Terry Gilliam dans lequel les fonctionnaires d’un gouvernement totalitaire appliquent des règlements insensés dans un monde kafkaïen à souhait. Drame réaliste, Moi, Daniel Blake partage néanmoins des similitudes avec le long-métrage du réalisateur membre des Monty Python. L’optimisme contagieux de Daniel Blake qui n’hésite pas à désarçonner ses interlocuteurs avec une bonne dose d’humour évite au film de sombrer complètement dans le pessimisme.

Mais, c’est surtout certaines séquences aberrantes dans son parcours du combattant administratif qui achèvent de placer le film sous le signe de l’absurde. On retiendra l’ouverture du film, anthologique, sur fond noir, avec la voix de la responsable « santé » qui s’évertue à poser des questions ineptes (pouvez-vous programmer votre réveil ? pouvez-vous poser sur votre tête un chapeau ?) et celle de Daniel qui s’interroge sur la capacité de son interlocutrice -qui n’est ni médecin, ni infirmière- à établir une évaluation de ses capacités physiques.

L’attachement du réalisateur à montrer en quoi certains outils techniques -l’informatique, internet, les centres d’appel- contribuent, s’ils sont mal utilisés, à une déshumanisation progressive des rapports professionnels et humains est aussi à souligner. Tout comme sa dénonciation des soi-disant experts ou « décisionnaires », sans aucune réelle expérience du métier, qui s’évertuent à culpabiliser -lors d’entrevues qualitatives ou de formations bidons– un héros qui a travaillé toute sa vie pour finir traiter comme un déchet. Le discours managérial brocardé par le réalisateur est à rapprocher de certaines compositions saisissantes, comme lorsque Daniel attend, dos au mur, contre la vitrine d’un magasin de joaillerie. Dans une Angleterre dévastée, où les travailleurs pauvres sont de plus en plus nombreux, les centres villes sont devenus des temples à la consommation, pour la gloire des grandes enseignes qui proposent des produits de m—-, fabriqués par des enfants ou des néo-esclaves, à l’autre bout de la planète…

Si la fin, prévisible, rattache le film au genre du mélodrame, et si, certains personnages, trop unidimensionnels, comme la mère courage Rachel, auraient pu gagner en profondeur, le message du film, et surtout la virtuosité de la réalisation méritent toute l’attention du spectateur. Le DVD comporte également trois bonus : un entretien avec Ken Loach, un documentaire sur Ken Loach et la bande-annonce.

Date de sortie en salles : 26 octobre 2016 (1h 41min) / Date de sortie DVD : 1ier mars
De Ken Loach
Avec Dave Johns, Hayley Squires, Dylan McKiernan…
Genre : Drame
Nationalités : Britannique, Français, Belge

Distributeur : Le Pacte

Palme d’Or à Cannes 2016


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