Dictionnaire Clint Eastwood, Andrea Grunert, éditions Vendémiaire

Les éditions Vendémiaire proposent de découvrir, depuis l’automne 2016, le dictionnaire Clint Eastwood, signé Andrea Grunert. Un ouvrage de qualité qui vient enrichir la très belle collection cinéma qui comprend d’autres dictionnaires, comme celui de Frank Lafond, sur le cinéma fantastique et de science-fiction.

La faillite de la famille nord-américaine des 60’s : Clint Eastwood dans Sur la Route de Madison.

A travers la filmographie de Clint Eastwood (comme acteur et réalisateur) et des entrées thématiques (des plus évidentes telles « justicier » aux plus complexes comme « fantômes » ou « double »), Andrea Grunert décortique l’œuvre d’un géant du cinéma, une cinématographie trop souvent analysée à travers le prisme des rôles de redresseurs de torts qu’il a incarnés lors de sa carrière.

Clint Eastwood dans le rôle du « Preacher » sans nom de Pale Rider.

Considérer que le cinéma d’Eastwood, viril, peuplé d’hommes d’action, est anti-intellectuel (tel que l’historien Richard M. Hofstadter définit ce terme en 1964) est parfaitement justifié. Mais, Grunert ne se contente pas de montrer dans quelle mesure les héros selon Eastwood se méfient de la bureaucratie ou de l’approche théorique pour régler des problèmes qui requièrent capacités professionnelles et psychologie. L’auteure analyse finement le lien entre l’identité de la nation américaine et les histoires de marginaux choisies par Eastwood pour les réaliser ou y jouer.

Kevin Costner, le braqueur au grand cœur d’Un Monde Parfait.

Dans le cinéma d’Eastwood, il y a un constat : la société américaine est défaillante, gangrénée par un mal qui la ronge depuis ses origines. Les hors-la-loi, les vieux réactionnaires incarnés par Eastwood (qu’on songe à Walt Kowalski dans Gran Torino) ou certains de ses doubles filmiques (Kevin Costner dans Un Monde Parfait ) font preuve de violence mais celle-ci n’est jamais gratuite ou motivée par un gain personnel. C’est la réponse d’hommes forts mais désabusés face à un système ou une administration iniques qui écrasent les plus faibles, que ce soit de jeunes voisins Hmong (Gran Torino) ou une jeune boxeuse talentueuse dont le malheur est d’être née au sein d’une famille white trash des Ozarks (Million Dollar Baby)

Eastwood dans Gran Torino.

Le Dictionnaire Eastwood met en lumière le pessimisme inhérent à la filmographie d’Eastwood. Reflet de l’échec du rêve américain, celle-ci est aussi l’expression de choix politiques et de paris artistiques (peu de producteurs misaient sur le personnage raciste développé par le scénariste de Gran Torino, Nick Schenk), plus discrets mais néanmoins aussi forts que ceux d’un Robert Redford. Andrea Grunert analyse avec brio le traitement du noir et de la photographie dans les films réalisés par Eastwood. Elle n’omet pas non plus de souligner l’importance de la bande-son et surtout de l’amour d’Eastwoood pour le jazz (Bird bien sûr, mais aussi Play Misty For Me avec des images documentaires du Monterey Jazz Festival ou Sur la Route de Madison qui comporte des morceaux peu connus de Dinah Washington et de Johnny Hartman), le rock (Jersey Boys) ou la country dans sa manière de rendre hommage à des figures déchues ou oubliées de la société civile américaine.

Clint Eastwood et son fils Kyle Eastwood dans Honky Tonk Man.

Parfaitement documenté, rigoureux dans ses analyses et regorgeant d’anecdotes peu connues, le Dictionnaire Clint Eastwood est l’ouvrage essentiel dans la bibliothèque des fans de Clint Eastwood et au-delà dans celle de tout cinéphile intéressé par l’évolution du paysage cinématographique nord-américain de ces 40 dernières années.

Bronco Billy, le show business d’une bande de marginaux.

ISBN : 978-2-36358-243-0
Prix : 28 €
256 pages
Parution : 20 octobre 2016

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