La peau de Bax, Alex Van Warmerdam, 18 novembre
La peau de Bax, c’est un affrontement, sans cesse retardé, entre deux hommes que tout oppose… Thriller à l’humour grinçant, le dernier film du réalisateur néerlandais Alex Van Warmerdam instaure une tension psychologique savamment dosée jusqu’au dénouement final, absurde et amoral. Pour sa femme et ses deux petites filles modèles, Schneider est un garagiste sans histoires. Le jour de son anniversaire, alors qu’il pensait rester chez soi, pour aider aux préparatifs de la réception du soir, Schneider est sommé d’abattre Bax, un présumé infanticide, qui se terre dans une maison sur pilotis, au milieu des polders.
Bax nous est présenté comme un gars pas très sympathique, égoïste, qui retarde constamment les présentations entre sa dernière copine et la fille qu’il a eue d’une précédente relation sentimentale. Lorsque sa progéniture, en pleine dépression, débarque enfin, il tente de lui refiler comprimés en tout genre pour la calmer et retourner tranquillement à la rédaction de son roman… Car Bax est un auteur et comme tous les auteurs, un peu vampire et narcissique sur les bords, avec un art consommé de la répartie cynique. Autant Bax est porté sur les substances illicites qui permettent de voir la réalité sous un autre angle, autant sa fille est une control-freak, fière de son régime diététique et de sa vie bien réglée, qui ne l’aident pourtant pas à être heureuse… Le face à face père-fille est rythmé par des échanges verbaux savoureux (« Le muesli, c’est une nourriture pour chèvre! » dixit Bax) et évolue peu à peu vers une relation complètement inattendue à mesure que la menace représentée par Schneider se fait plus proche…
Contrairement à la Isla Minima, thriller espagnol qui se déroulait aussi dans des paysages marécageux, La Peau de Bax est un film animé d’une vie propre. Autant La Isla Minima, excellent divertissement était un film d’action carré, de facture classique, autant La peau de Bax échappe à toute tentative de classification : c’est vraiment l’œuvre d’un cinéaste avec une vision propre, une imagination singulière.
Le rêve et l’absurde pointent régulièrement le bout de leurs nez, que ce soit sous la forme d’un grand-père priapique ou d’un petit garçon aveugle. La réalité se cache derrière les apparences semble susurrer le vent dans les joncs. Qui est réellement la proie ? Qui est le chasseur? Les personnages de La peau de Bax ne sont-ils pas tous manipulés ? Embourbés dans des situations dont le contrôle leur échappe totalement, leurs tentatives pour se libérer nous entraînent dans un voyage aux tréfonds de leur inconscient, en ruines, comme les bicoques visitées par la fille de Bax…
Schneider, si méticuleux, est constamment « dérangé » dans sa tentative de meurtre comme si le destin s’acharnait contre lui… Et l’omniprésence des appels de téléphone portable (qui rappellent ceux du film coréen A Hard Day) renforce chaque fois un peu plus le décalage burlesque entre l’horreur de la boucherie qui se prépare et la façade sociale des meurtriers…
Certainement l’un des meilleurs films de cette fin d’année. Grand Prix Nouveau Genre à la dernière édition de l’étrange festival.
Date de sortie : 18 novembre 2015 (1h36min)
Réalisé par Alex Van Warmerdam
Avec Tom Dewispelaere, Alex Van Warmerdam, Maria Kraakman…
Genre : Comédie, Thriller
Nationalité : Néerlandais
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