Dìdi, de Sean Wang, 16 juillet

Dìdi, un jeune Américano-Taïwanais, vient de finir le collège. Devant lui, les grandes vacances, et l’été qui semble infini. Sa grande soeur s’apprête à quitter la maison : elle a été prise à UCSD, l’Université de Californie à San Diego. Ce n’est pas Stanford, comme le fait remarquer une amie de la famille, mais c’est déjà pas mal. Pas mal, voilà le problème de Dìdi qui peine à trouver sa place dans un groupe d’ami.es. Trop asiatique pour certains, pas assez pour d’autres. Trop trash pour certaines filles, trop romantique pour d’autres. A cheval entre deux cultures, Dìdi grandit dans une maison où son père est étrangement absent.

Installé depuis des années à Taïwan, le géniteur est une figure fantôme qui plane, impérieux mais presque jamais nommé, sur la maisonnée écrasée par la chaleur. Dìdi tient de sa mère, une artiste peintre qui aurait aimé vivre à New York mais qui se retrouve coincée avec sa belle-mère, matriarche commandante, dans une banlieue pavillonnaire californienne. Et si Dìdi a des capacités certaines pour raconter des histoires, mettre en images des sentiments, on lui fait vite comprendre – à part la bande de skateurs qui les premiers, lui offrent une chance de faire ce qu’il aime – que ce chemin lui est interdit.

Si le film est ouvertement biographique (certaines scènes ont été tournées dans la maison d’enfance du réalisateur et l’actrice qui joue la grand-mère de Dìdi est la grand-mère du cinéaste), le premier long-métrage de Sean Wang prend la peine de développer tous les personnages du film, alternant les points de vue sur cet été, qui malgré sa lenteur et son côté anecdotique, se révèle décisif pour tous. Ancré dans une période bien précise qui correspond à la découverte des premiers réseaux sociaux – MySpace – par toute une génération, Dìdi possède aussi une dimension universelle et intemporelle. C’est le temps des amitiés fortes, des premiers baisers… et pour la mère de Dìdi, interprétée avec beaucoup de subtilité par Joan Chen, la réalisation que son petit bonhomme s’émancipe et se détache progressivement – mais sûrement – d’elle.

Il y a énormément de douceur et de tendresse dans ce film qui montre pourtant à l’écran des relations cabossées. La soeur de Dìdi a hâte de quitter le foyer familial dysfonctionnel mais en même temps, elle continue de veiller sur son petit frère. Dìdi, coincé entre plusieurs images de lui-même, se sent terriblement incompris, et en retour, se montre assez méprisant avec toutes les personnes qui tiennent à lui. L’éclatement identitaire est astucieusement évoqué à travers les incrustations ou gros plans sur les différents profils d’ami.es ou vidéos youtube consultés par l’adolescent.

La rencontre avec les skateurs qui l’engagent comme réalisateur de clip correspond à un moment charnière pour Dìdi. Ici, on est loin de Gus Van Sant et de sa peinture d’une adolescence malade et paumée. Certes, la drogue et l’alcool sont présents (lors d’une soirée) mais, au contact de ces slackers, ivres de liberté et d’authenticité, Dìdi apprend à tomber le masque, à dire ce qu’il ressent, et à aimer sa maman pour ce qu’elle est.

Film pudique et sensible sur l’adolescence, Dìdi porte aussi un regard critique sur la société nord-américaine qui, au lieu de célébrer la différence et la liberté, tend à enfermer sa jeunesse dans des rôles stéréotypés. Si Dìdi se résout à choisir une chapelle (celle des fans de cinéma) lors de sa rentrée au lycée, les regards qu’il lance à ses anciens amis – eux aussi éparpillés dans différents clubs, éloquence, science… – montre qu’il se réserve le droit d’embrasser autant d’identités qu’il lui plaira.

16 juillet 2025 en salle | 1h33min | Comédie, Drame
De Sean Wang
Avec Izaac Wang, Joan Chen, Shirley Chen

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