Hiver à Sokcho, Koya Kamura, en DVD / BRD & VOD
Hiver à Sokcho, premier long-métrage de Koya Kamura, cinéaste franco-japonais, est disponible en DVD depuis le 8 mai, après une sortie nationale le 8 janvier.
C’est un film d’un charme fou, notamment grâce à l’alchimie qui existe entre les deux protagonistes principaux du film, interprétés par Roschdy Zem et la jeune Bella Kim. L’action se déroule, comme l’indique le titre, le temps d’un hiver, à Sokcho, petite ville portuaire de Corée du Sud. Un auteur de BD et romans graphiques français, Yan Kerrand, fait irruption dans la vie bien rangée de Soo-Ha, cuisinière érudite, employée dans une petite guest-house. Les deux êtres, tous les deux en rupture, même si cela est moins apparent pour Soo-Ha, vont s’apprivoiser mutuellement, s’espionner, s’aimer, avant de se séparer sur ce qui ressemble à un malentendu.
Soo-Ha n’a pas connu son père, un français, et peu à peu, elle en vient à s’interroger sur les véritables raisons de la présence de l’écrivain à Sokcho, ville qui ne possède pas le charme ou la notoriété de Séoul ou Kyoto. D’abord intriguée et séduite pas les dessins à l’encre noire de l’auteur, elle commence à l’observer, à se renseigner sur lui en regardant sur internet des interviews… Et si Kerrand était son géniteur ? Cette quête de père bouleverse la jeune femme, la pousse à commettre des actes dont elle ne semblait pas capable avant.
Le film de Koya Kamura traite moins de la filiation que de l’acte de création. Kerrand n’est pas équivoque parce qu’il laisse parfois planer le doute, il est ambigu car il se nourrit du désarroi de la jeune femme, comme il l’avoue à la fin. Le passé de Soo-Ha va devenir le moteur d’un nouveau livre. C’est bien le statut de vampire de l’écrivain qui est mis en lumière dans ce film doux-amer.
A la faveur de coïncidences qui ne relèvent que d’un hasardeux concours de circonstances, Soo-Ha va s’imaginer retrouver le père qu’elle n’a jamais connu. Si la relation entre ces deux êtres qui partagent un penchant pour une certaine solitude est faussée dès le départ, elle n’en demeure pas moins riche de sens et d’opportunités, à la fois pour Soo-Ha qui se révèle à elle-même, et pour Kerrand qui retrouve l’inspiration.
Hiver à Sokcho est l’adaptation d’un roman éponyme d’Elisa Shua Dusapin. Pour rendre compte de la tourmente dans la tête de son héroïne, Koya Kamura a inséré de courtes séquences animées réalisées par Agnès Patron avec un sens de l’épure qui sied à ce film à la narration très simple.
Hiver à Sokcho, réflexion sur le dépaysement et le déracinement, rappelle à certains égards Lost in Translation qui mettait en scène la rencontre de deux solitudes personnifiées par un homme d’âge mur et une toute jeune femme. Si contrairement à Charlotte (Scarlett Johansson dans Lost in Translation), Soo-Ha n’est pas une touriste, elle n’en demeure pas moins étrangère dans son propre pays.
Trop grande, trop cultivée, pas assez maquillée, Soo-Ha entend continuellement des remarques sur son apparence ou sa manière de se comporter. Réflexion sur la double identité (qui fait que l’on se sent parfois nulle part chez soi), Hiver à Sokcho reste résolument optimiste et délivre in fine un beau portrait de femme qui, telle un papillon au sortir de l’hiver, quitte sa chrysalide pour enfin vivre libre.
Le DVD comporte plusieurs suppléments très intéressants : un making-of inédit, des scènes coupées, commentées par le monteur Antoine Flandre, un entretien avec le réalisateur et la bande-annonce du film.
8 janvier 2025 en salle | 8 mai 2025 en DVD & BRD
1h45min | Drame
De Koya Kamura
Avec Roschdy Zem, Bella Kim, Park Mi-hyeon
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