Retour sur un film : Aimer Perdre, Harpo Guit, Lenny Guit, 26 mars

Aimer perdre est le portrait d’une looseuse magnifique : Armande Pigeon. Son patronyme est trompeur : Armande est loin d’être innocente ou bête. Son instinct de survie lui permet de se débrouiller alors qu’elle est pourtant sans emploi et sans toit. Quand débute Aimer Perdre, Armande dort dans le salon d’une matriarche (interprétée par Catherine Ringer) à qui elle est censée verser une centaine d’euros par mois. Mais assez vite, on comprend qu’Armande vampirise tous ceux qui lui tendent la main. Cela fait plusieurs mois qu’elle dort gratuitement chez cette âme charitable et cela fait une éternité qu’elle doit de l’argent à tous ses copains de galère bruxellois.

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Filmer en mode documentaire réaliste ou film bricolé à moitié fauché, Aimer Perdre est une truculente galerie de personnages. Armande bien sûr mais aussi une ribambelle d’amoureux transis qui gravitent tels des satellites autour d’elle. Il y a d’abord Schlock, fils de Ruth mais pas forcément d’Amin. On retrouve Michael Zindel, déjà génial dans Le dernier des juifs, dans un nouveau rôle lunaire. Il partage avec Armande le même goût des paris, sauf que contrairement à elle, il essaie de jouer réglo parmi les grands.

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Le décalage entre ses tentatives pour impressionner Armande (avec un super costard lorsqu’il intègre le cercle de jeu) ou pour la séduire (avec un rendez-vous au parc aquatique Plopsaland !) sont l’occasion de savoureux gags, rendus encore plus cocasses par la manière loufoque de filmer des réalisateurs belges Harpo et Lenny Guit. Quand Schlock, après s’être fait poser un lapin par Armande, se fait aspirer par le tunnel aquatique géant, et qu’il en ressort essoré, c’est peut-être la première fois au cinéma qu’un spectateur a l’impression d’avoir lui aussi pris une douche.

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Les réalisateurs ont-ils souhaité, avec le nom de ce personnage, faire un clin d’oeil au premier film de John Landis, Schlock, sorti en 1973 ? Dans tous les cas, les mésaventures d’Armelle, filmées caméra à l’épaule, souvent en close up, parfois, comme au casino, avec des téléphones portables pour leur effet brut et clandestin sont jalonnées de rencontres plus improbables les unes que les autres. L’énergie dégagée par la comédienne, qui sème la pagaille partout où elle passe, n’est pas sans rappeler celle du singe de Landis… Dès lors, s’opère un renversement de situation avec la comédie horrifique. La demoiselle n’est plus en détresse : ce sont les hommes qui sont devenus les otages d’Armande qui les malmène jusqu’à ce qu’elle obtienne ce qu’elle souhaite.

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Moins trash et scatologique que Fils de Plouc ou leurs vidéos partagées sur la chaîne Youtube Clubb Guitos , Aimer Perdre est un condensé d’humour burlesque qui réserve néanmoins au spectateur une scène assez nauséabonde dans des toilettes sur palier. Les réalisateurs maltraitent Armande mais, la dotent aussi paradoxalement d’un incroyable pouvoir de séduction, en dépit de sa pilosité ! Elle se heurte à plusieurs propositions de couple : la version romantique mais aussi totalement kitch de Georgio, qu’on croirait extraite d’une séquence de l’émission culte belge Striptease, la version manipulatrice et possessive du directeur de casting ou celle, amicale et fraternelle, de Schlock, avec qui elle a déjà partagé pas mal de combines et coups durs.

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Dans cette avalanche de seconds rôles absurdes, on retrouve Maxi Delmelle, déjà de la partie dans Fils de Plouc, incroyablement sexy dans son survêt ringard et Melvil Poupaud, à la fois pathétique et machiavélique ! A travers ce personnage de père de famille accro aux paris (qui se cache de sa femme et de ses enfants sur le balcon de son appartement standing !), le film creuse un peu plus la veine tragique de cette errance – aux allures de course poursuite drolatique dans les bas-fonds bruxellois. Ce qui guette Armande et tous ces accros au jeu, c’est le surendettement, et à terme la rueAimer perdre est aussi le regard sans concession sur une dérive autodestructrice.

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26 mars 2025 en salle | 1h 26min | Comédie, Drame, Romance
De Harpo Guit, Lenny Guit
|Par Harpo Guit, Lenny Guit
Avec María Cavalier-Bazan, Axel Perin, Michael Zindel

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