Le vieil homme et l’enfant, de Ninna Pálmadóttir, 3 avril
En Islande, un fermier, Gunnar, est exproprié de son exploitation. La destruction est imminente. L’eau d’un barrage va venir engloutir ses prés, sa ferme, sa maison et ses granges… Il revend ses chevaux dont son étalon gris, seul vrai ami et compagnon de vie, et il part s’installer à Reykjavik. Le gouvernement islandais n’étant pas corrompu, Gunnar, qui avait pourtant refusé de vendre, a reçu 150 millions, largement de quoi finir sa vie à l’abri des dettes et du besoin, comme lui indique le juriste venant lui annoncer la décision du tribunal. Mais Gunnar, vieux loup solitaire, qui ressemble davantage à un marin qu’à un agriculteur, est un drôle d’oiseau. Tout au moins d’après nos normes… De sa maison familiale, transmise par son grand-père, le premier exploitant de la ferme, il ne conserve rien, à part quelques photos de famille et des livres sur les échecs. Cela tombe bien, il va pouvoir inculquer les règles de ce jeu à Ari, un livreur de journaux âgé de 10 ans, son nouveau voisin à la capitale.
Le titre original de ce premier long-métrage réalisé par Ninna Pálmadóttir est Solitude, ce qui résume parfaitement ce récit intergénérationnel. Auprès de Gunnar, Ari découvre la chaleur et la bienveillance d’un vrai foyer. Ses parents, récemment divorcés, sont trop accaparés par leurs vies professionnelles pour offrir un cadre structurant à leur fils, qui grandit et s’élève tout seul. Ils arrivent à la fin de son match de foot, ne sont jamais à la maison quand il rentre de l’école, et comble de malheur, il ne cessent de se disputer lorsque survient le temps des gardes alternées. Si Gunnar parle peu, il est lui à l’écoute, attentionné et il transmet le peu qu’il connaît de la vie à son jeune protégé. Bref, c’est un père de substitution.
Þröstur Leó Gunnarsson joue à merveille ce marginal au grand coeur. Au-delà de la peinture d’une famille atomisée, hélas devenue la norme, la réalisatrice s’intéresse au cynisme d’une société qui juge tout acte gratuit de gentillesse forcément suspect. L’alternance de scènes intimistes en ville avec de grands plans larges à la campagne insuffle un souffle bienvenu à un drame qui, par moments, se révèle, dans la noirceur de ces deux solitudes subies, quelque peu déprimant. Projeté en compétition à l’édition 2023 du Arras Film Festival. Distribué par Jour2Fête.
3 avril 2024 en salle | Drame
De Ninna Pálmadóttir
|Par Rúnar Rúnarsson
Titre original : Solitude
Avec : Þröstur Leó Gunnarsson
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