Comme un lundi, de Ryo Takebayashi, 8 mai 2024
Comme un lundi est la réponse japonaise au film culte d’Harold Ramis, Un jour sans fin (Groundhog Day ou Le jour de la marmotte, 1993). Mais, les temps ont changé : dorénavant tout n’est que productivité et réalisation de soi par le travail, des valeurs qui étaient déjà la norme au pays du Soleil Levant lorsque Bill Murray tentait de profiter au maximum des opportunités offertes par son emprisonnement dans une boucle temporelle. Dans Comme un lundi, plusieurs employés d’une agence publicitaire vont donc continuer de travailler comme si de rien n’était. Yoshikawa, employée modèle, est l’incarnation de ce professionnalisme jusqu’au-boutiste, prête à sacrifier petit ami et santé mentale afin d’honorer des deadlines impossibles à tenir. Etre piégée dans une boucle temporelle représente donc pour elle un atout : elle va pouvoir abattre encore plus de travail et anticiper toutes les embûches qui pouvaient faire capoter les nombreux projets de son entreprise.
La différence notable avec le film culte d’Harold Ramis est la prise de conscience – successive – par chacun des employés de la boîte, en commençant par le moins gradé jusqu’au patron lui-même, d’être coincé dans une semaine qui ne se termine jamais. L’aventure solitaire de Bill Murray a fait place à une destinée partagée qui change en profondeur les valeurs et aspirations de tout le collectif. L’action resserrée sur un jour – qui semble se répéter avec moults effets comiques – s’étire ici sur une semaine, également sans fin, avant bien sûr le happy end de rigueur dans cette comédie familiale.
Dans un film avec un postulat de science-fiction comme celui-ci, il est normal que plusieurs éléments du décors ou de l’action réapparaissent. Chaque matin, le même coursier fait irruption dans les bureaux, le même passant, observé de la fenêtre, ramasse et restitue un mouchoir égaré par la promeneuse devant lui… Un film où les personnages sont coincés dans une boucle temporelle commence à être intéressant lorsqu’ils se mettent à agir sur les situations à venir, dans une tentative – souvent désespérée – d’avoir enfin prise sur les événements.
Or, dans Comme un lundi, ce moment de bascule narrative, n’intervient que trop tardivement pour susciter réellement l’intérêt. L’idée originale de départ était de montrer quels arguments – ou objets – utiliser pour faire prendre conscience aux collègues de cette situation hors-norme, et de contraster les réactions entre elles. Mais, les personnages secondaires sont trop nombreux et le tempo du film en pâtit. Restent quelques scènes où l’absurde et l’humour l’emportent sur l’ennui, comme celle de la coupure d’électricité ou bien le signe de ralliement (ailes de pigeon) pour celles et ceux qui sont déjà dans la confidence de cette boucle sans fin.
Projeté en avant première à l’édition 2023 de l’Etrange Festival, Comme un Lundi est une petite comédie SF qu’on aurait aimé un poil plus audacieuse, tant sur le plan visuel que narratif. Et le message de fin – la vraie vie se déroule ailleurs qu’au bureau – est convenu, sauf peut-être pour les jeunes générations de salary men & women, toujours dispo à travailler plus pour gagner moins !
8 mai 2024 en salle | 1h23min | Comédie
De Ryo Takebayashi
Avec Ryô Ikeda, Wan Marui, Yûgo Mikawa, Koki Osamura, Momoi Shimada…
Titre original : Mondays
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