Le club des miracles, de Thaddeus O’Sullivan, 24 janvier 2024
Brochette d’actrices connues (Maggie Smith, Laura Linney, Kathy Bates) pour ce mélo irlandais de facture classique, réalisé par Thaddeus O’Sullivan dont on avait apprécié December Bride (1991). Soit l’enterrement d’une vieille dame, pilier de sa petite paroisse. Son rêve le plus cher était de se rendre à Lourdes avec ses amies et voisines. Qu’à cela ne tienne, le corps est à peine refroidi que la petite communauté de fidèles organise un concours de chant avec, à la clef, un séjour tous frais payés dans la cité des apparitions mariales. Les premières minutes du film sont les plus drôles : on suit trois personnages féminins, de trois âges différents, qui enfilent leur robe et se maquillent quelques minutes avant le début de leur entrée en scène. Les personnages – leurs origines, leur caractère – sont posés en quelques instants à travers une construction en miroir. Ces trois femmes évoluent dans leurs familles ou couples en parallèle, et leurs fêlures et rêves ne sont que plus évidents.
Puis, assez vite, avec l’apparition d’une 4e héroine, la comédie vire au drame. Elle, c’est Eileen, l’Américaine, une fille du pays qui a émigré à Boston et quitté son fiancé irlandais. Elle est habillée avec élégance et elle revient pour l’enterrement de sa mère qu’elle n’avait pas revue depuis 40 ans. Laura Linney campe avec grâce l’un des rares personnages féminins à ne pas être prisonnière des préjugés et de la rancune. Elle est pourtant l’outsider, celle que la communauté rejette, après l’avoir bannie, au sortir de l’adolescence.
Le voyage et le séjour à Lourdes seront prétextes à dévoiler secrets et mensonges. Obligées de cohabiter ensemble pendant plusieurs jours, ces 4 femmes tomberont le masque, et laisseront éclater une colère qui couvait depuis plusieurs décennies. L’un des mérites du film est de montrer une humanité (et une féminité) sous ce qu’elle peut avoir de plus abject et minable. Aux corps vieillissants de Maggie Smith et Kathy Bathes dans les fonds baptismaux pseudo miraculeux font écho des propos souvent rances, jamais bienveillants. C’est un peu la schizophrénie du film : le contexte social, politique et religieux mis en images dans une reconstitution historique soignée souligne les injustices dont les femmes étaient victimes à l’époque. Mais, le réalisateur s’échine à montrer, à travers ces portraits peu complaisants, que les victimes se muaient parfois en complices des forces d’oppression (ce qui, malgré la médiatisation des vertus de la sororité, est toujours le cas aujourd’hui)
Les actrices tirent toutes leur épingle du jeu, Maggie Smith en tête, qui prouve que même à 89 ans, on peut encore jouer dans un film. Hélas, le scenario oscille trop souvent entre drame social et comédie mordante, ce qui dessert in fine ce road trip féministe qui se conclue par un happy-end un peu trop beau pour sembler réaliste… même si Lourdes, paraît-il, fait des miracles. Face à ce groupe d’actrices chevronnées, un acteur non moins chevronné, l’irlandais Stephen Rea (The Crying Game, Michael Collins, V pour Vendetta), excellent en curé charmeur et intelligent.
24 janvier 2024 en salle | 1h30min | Comédie, Drame
De Thaddeus O’Sullivan
Par Jimmy Smallhorne, Timothy Prager
Avec Maggie Smith, Laura Linney, Kathy Bates
Titre original : The Miracle Club
Commentaires récents